Les 2 et 3 août 2025, Porto-Novo, capitale culturelle du Bénin, a vibré au rythme de la 2e édition du Festival des Masques. Plus qu’une simple fête populaire, l’événement s’impose comme un manifeste culturel et politique, au service d’une diplomatie béninoise décomplexée.
Durant deux jours, la ville aux trois noms a vu défiler les grandes figures du panthéon vodun (Zangbéto, Egungun, Guèlèdè, Gounouko, Hounvè) aux côtés de masques sacrés et profanes venus de tout le pays, ainsi que d’invités étrangers. Cinq lieux emblématiques à savoir : Lokossa, Migan, Abessan, Dangbé, Klunon, Honto et Houngbo Honto, ont été transformées en scènes rituelles à ciel ouvert.
« Le Festival des Masques ne saurait être réduit à un simple divertissement », a martelé Jean-Michel Abimbola, ministre du Tourisme, de la Culture et des Arts avant d’ajouter : « C’est un acte politique fort, un manifeste de souveraineté culturelle ».
Ifá, matrice de savoirs et outil diplomatique
En ouverture, un colloque scientifique à l’École du Patrimoine Africain a posé le cadre : « Ifá Òrúnmìlà : introduction à une épistémologie ». Chercheurs et prêtres vodun y ont défendu la reconnaissance des savoirs endogènes africains comme de véritables systèmes de pensée.
Jean-Michel Abimbola y a annoncé la création à Porto-Novo d’un Centre d’interprétation d’Ifá, espace de dialogue entre chercheurs, artistes et dignitaires religieux, tout en exprimant le souhait du retour au Bénin de la tablette de divination de Guèdégbé, conservée à l’étranger.
Pour Charlemagne Yankoty, maire de Porto-Novo, « le festival plonge le pays dans les profondeurs de son héritage spirituel et s’inscrit dans la vision présidentielle de révélation des cultures endogènes ».
400 masques en parade, un public conquis
La scénographie, conçue par l’artiste Didier Sèdoha, a transformé la parade de clôture en voyage initiatique : 400 masques et divinités ont envahi les rues, dans une ambiance à la fois festive et mystique.
Invitée d’honneur, la Côte d’Ivoire a présenté les masques Zaouli et Goli du peuple Gouro. Le Nigéria voisin a mis en avant les masques yoruba N’nèwi, soulignant la parenté culturelle ouest-africaine. Sur l’esplanade de l’Assemblée nationale, un « village du festival » proposait artisanat, gastronomie et démonstrations de fabrication de masques, attirant touristes et curieux.
Le soir, un concert géant gratuit a réuni des légendes comme Sagbohan Danialou, Zeynab ou Don Metok, confirmant l’ambition populaire et régionale de l’événement.
Un levier de soft power africain
Pour Wenceslas Adjognon, coordonnateur du festival, « chaque masque porte une histoire et une fonction communautaire ; les Béninois se reconnaissent en eux, d’où l’importance d’un festival qui leur soit dédié ».
Le gouvernement mise sur cette dynamique : en juin 2025, un Plan stratégique de développement touristique 2025–2029 doté de 797 milliards FCFA (environ 1,4 milliard €) a été adopté pour faire du Bénin une destination culturelle majeure, sous la marque « Le Bénin, un Monde de Splendeurs ».
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