Accueil Politique & Société Le Niger de Tiani : la peur des voisins plutôt que des terroristes
Politique & Société

Le Niger de Tiani : la peur des voisins plutôt que des terroristes

Niger Tiani terroristes

Alors que le Niger traverse l’une des pires crises sécuritaires de son histoire récente, le général Abdourahamane Tiani préfère pointer du doigt ses voisins plutôt que d’affronter ses propres responsabilités. Le Bénin, dernier en date à être accusé, devient le nouveau bouc émissaire d’un régime militaire en quête de légitimité par la confrontation.

Une diversion bien rodée

Depuis le coup d’État de juillet 2023, le général Tiani peine à convaincre qu’il maîtrise la situation au Niger. Le pays, en proie à une recrudescence alarmante des attaques terroristes, compte plus de 130 soldats tués en moins d’un mois. Et pourtant, au lieu d’un discours de lucidité et de responsabilité, c’est une nouvelle charge contre l’extérieur que le chef de la junte a livrée le 31 mai.

Cette fois encore, le Bénin est dans son viseur. En cause : la prétendue présence de troupes françaises sur le sol béninois qui menaceraient la sécurité du Niger. Le général justifie ainsi le maintien de la fermeture de la frontière avec Cotonou, qui pénalise d’abord les populations nigériennes frontalières, dépendantes des échanges commerciaux régionaux.

L’ennemi, ce n’est pas le Bénin

À y regarder de plus près, cette rhétorique d’agression venue de l’extérieur est aussi usée qu’elle est infondée. Le Bénin n’a jamais initié d’hostilité envers le Niger. Sa coopération militaire avec la France s’inscrit dans un cadre bilatéral souverain, motivé par une stratégie antiterroriste efficace, notamment dans la région de la Pendjari.

Mais surtout, le Bénin n’a jamais abrité (ni dans son passé, ni aujourd’hui) une base militaire étrangère sur son territoire. Et pour dissiper tout doute, les autorités béninoises n’ont cessé d’inviter officiellement leurs homologues nigériens à venir vérifier eux-mêmes, sur le terrain, l’inexistence de toute installation suspecte. Cette transparence n’a jamais été saisie par la junte nigérienne, préférant entretenir la suspicion plutôt que d’ouvrir le dialogue.

Une AES aux allures d’impasse

Tiani, comme ses homologues du Burkina Faso et du Mali, fait vivre un projet : l’Alliance des États du Sahel (AES), conçue comme alternative à la CEDEAO. Mais l’AES ressemble de plus en plus à une union des régimes autoritaires que des peuples souverains. La mutualisation des ressentiments ne fait pas une vision politique. Et la fabrication d’ennemis communs ne remplace ni les plans de développement ni les réformes nécessaires.

Pendant que la CEDEAO tente de maintenir une logique d’intégration régionale, l’AES se replie sur une vision militariste, nationaliste et isolationniste, qui aggrave les fractures internes plutôt qu’elle ne les comble.

La souveraineté à géométrie variable

L’argument de la souveraineté, régulièrement brandi par Tiani, devient contradictoire lorsqu’il l’utilise pour refuser à d’autres États (en l’occurrence le Bénin) le droit de choisir leurs partenaires ou de défendre leur territoire comme ils l’entendent. La vraie souveraineté ne consiste pas à imposer sa vision à ses voisins, mais à assumer ses responsabilités à l’intérieur de ses propres frontières.

Ce que le Niger vit aujourd’hui n’est pas la faute du Bénin, ni celle des UASA ou de la France. C’est la conséquence d’un vide stratégique créé par une rupture de l’ordre républicain, le rejet de partenaires régionaux et internationaux, et un aveuglement idéologique qui transforme chaque voisin en menace potentielle.

Une frontière fermée, un avenir bouché

Tiani maintient la fermeture de la frontière avec le Bénin. Mais cette décision ne punit pas Cotonou. Elle pénalise les populations. Les commerçants de Gaya, les agriculteurs de Dosso, les familles qui vivaient du flux transfrontalier, sont les premières victimes de cette posture de repli. Derrière l’obsession géopolitique se cache un drame humain.

Et pendant que la junte joue aux échecs diplomatiques, les groupes armés avancent, les civils fuient, et les espoirs de stabilité s’éloignent.

La vérité nue

À travers ses accusations contre le Bénin, le général Tiani cherche à gagner du temps, à consolider son pouvoir, à détourner l’attention. Mais les faits sont têtus : ce ne sont pas les troupes françaises au Bénin qui tuent les soldats nigériens. Ce sont les groupes terroristes à l’intérieur du Niger.

Et pendant que les généraux regardent vers le sud, les menaces viennent du nord, de l’ouest, et surtout de l’intérieur.

Laisser un commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Dans la même catégorie

Bénin : deux jours fériés et payés annoncés pour les travailleurs

Au Bénin, le vendredi 6 juin et le lundi 9 juin 2025...

Concours au Parlement des Jeunes : trois candidats saisissent la Cour constitutionnelle

Trois candidats exclus de la présélection pour la 4e mandature du Parlement...

Bénin : lieu et dates pour retirer les attestations de Licence et Master

Les étudiants ayant soumis un dossier physique pour obtenir leur attestation de...

Drame : 7 membres d’une même famille décèdent dans un accident à Sakété

À Sakété, dans le département du Plateau, un drame routier a endeuillé...